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La discrimination positive est-elle toujours un avantage pour les femmes ?

Source | Extrait de la Tribune de Dominique Brard diffusée sur LinkedIn le 16.03.21

Alors que l’on dresse le bilan des 10 ans de la loi Copé-Zimmermann imposant aux entreprises de nommer 40 % de femmes dans les conseils d’administration des entreprises, je m’interroge sur la place tenue par les femmes dans le milieu professionnel et malheureusement, sur les nombreux stéréotypes qui perdurent. Le fameux plafond de verre semble encore bien loin de se briser.

Aujourd’hui, les femmes représentent 46% des conseils d’administration du CAC 40…. Un vrai succès de la loi Copé-Zimmermann ! Mais pour ma part, je reste sceptique. La démarche du gouvernement pour tenter d’instaurer plus de parité en entreprise me semble louable, mais force est de constater que les résultats sur le terrain sont éloignés des ambitions. D’abord parce que la part de femmes dans les autres instances dirigeantes reste faible. Et d’autre part, parce que la crise a levé le voile sur les inégalités latentes. En effet ce sont bien les femmes qui l’ont subi de plein fouet sur le plan professionnel : une étude de l’INED précise ainsi « qu’elles ont plus souvent perdu leur emploi » et que « leurs conditions de travail ont été moins bonnes ».

Par ailleurs, il me semble que la loi Copé-Zimmermann a pu renforcer les a priori sur les femmes, en privilégiant « la quantité versus la qualité », autrement dit, les quotas plutôt que les compétences propres. La notion de parité imposée ne porterait-elle pas davantage préjudice aux femmes ? C’est l’une des questions que nous nous sommes posées lors des Rencontres RH du Monde en janvier dernier.
L’instauration de quotas est une forme de discrimination positive. Et comme le souligne Baptiste Villenave, maître de conférence et auteur, la discrimination positive reste… de la discrimination. Elle peut exacerber certains problèmes en accentuant les différences entre les groupes sociaux et même créer davantage de stigmatisations. C’est ainsi, il me semble, que depuis 2011, cette discrimination positive alimente les fausses croyances et renforce le syndrome de l’imposteur chez de nombreuses femmes en s’appliquant à évaluer le travail d’un collaborateur en fonction de son sexe. En somme, « si tu es arrivée là, c’est parce que tu es une femme, pas parce que tu as les compétences requises ».

Cette réflexion est également intimement liée à celle du leadership féminin, qui suggérerait que les femmes ont une façon différente de diriger que les hommes. Je ne crois pas à un leadership au féminin, et il m’apparaît même essentiel de lutter contre les préjugés selon lesquels une compétence ou soft skill aurait un genre particulier. Pour reprendre les mots de Christophe Aulnette dans un article du Monde de cette semaine : « Il faut en finir avec cette approche : c’est avec ce discours qu’on enferme encore davantage les femmes dans les stéréotypes que l’on prétend par ailleurs dénoncer. »

En effet, les compétences et qualités intrinsèques d’une personne ne devraient-elles pas peser plus fort dans la balance ? Il me semble que recruter et promouvoir sur une forme de méritocratie, avec des critères qui ne se fonderaient que sur la qualité des missions accomplies et l’implication du collaborateur serait plus efficace.

Pour autant, loin de moi, l’idée de condamner toute forme d’initiatives d’inclusion et d’égalité. Je pense, cependant, que c’est le fond des réformes qui doit être repensé. Je suis convaincue que si nous passons de lois encourageant la diversité par les quotas à des lois plus volontaristes reposant sur la liberté de choisir, un équilibre naturel se mettrait en place. Le modèle scandinave est en la parfaite illustration ! Le congés maternité, qui pèse beaucoup sur les carrières des femmes, est un congé parental en Suède : les jeunes parents disposent de 480 jours qu’il se partagent selon leur souhait. La loi n’impose aucune règle basée sur le sexe du parent. Est-ce là, la raison d’un tel équilibre entre les hommes et les femmes en entreprise ou cette flexibilité est-elle le résultat d’un modèle de société paritaire ? La question peut se poser mais le résultat est là.

C’est une réflexion qui va évidemment au-delà du monde du travail. Je suis convaincue que c’est dès la petite enfance que nous devons éradiquer l’idée qu’il existe des métiers de fille et des métiers de garçon. L’éducation est la clé de l’égalité entre les femmes et les hommes.

 

DB2Dominique Brard,
Directeur Général Talent Solutions France

 


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