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L’activité partielle est l’un des principaux plans d’urgence mise en place par l’État pour aider les entreprises à faire face à la crise économique engendrée par le confinement. L’objectif étant de limiter le recours massif aux plans sociaux. Une solution temporaire qui a coûté 26 milliards d’euros en deux mois à l’État. Une des étapes suivantes de ce grand plan gouvernemental est la révision du prêt de main d’œuvre. Un dispositif loin d’être nouveau mais dont les conditions ont été, au 10 juin dernier, largement assouplies. Entre urgence d’agir, périmètre d’actions limité et complexité administrative, ce dispositif est-il vraiment la solution pour limiter l’activité partielle et les PSE ? Dominique Brard, Directrice Générale de Talent Solutions, partage son point de vue sur la question. Des propos soutenus par l’analyse experte de Grégory Chastagnol, associé de FACTORHY Avocats, et avocat spécialisé sur les sujets stratégiques de restructuration et les contentieux collectifs complexes, de masse ou à risques.
« Selon mon expérience, le prêt de main d’œuvre inter-entreprises est un formidable dispositif de GPEC (Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) pour des changements en douceur mais n’est en aucun cas adapté à une situation de crise. Déjà très complexe à mettre en place en situation normale, il s’adresse à un nombre restreint d’entreprises, repose encore sur de nombreux paramètres inconnus et est régi par un décret toujours en attente bien que la date limite de son allégement ait été fixée au 31 décembre 2020. En cela, il s’agit davantage d’une mesure structurelle que conjoncturelle.
Son intérêt principal est qu’il n’y a pas de facturation de l’euro à l’euro des salariés, c’est-à-dire sans surcoût de salaire, charges et indemnités incluses, permettant ainsi, en théorie, de limiter le recours à l’activité partielle. En revanche, cela n’empêche pas les PSE. » Analyse Dominique Brard.
Pour rappel, le dispositif prêt de main-d’œuvre non lucratif, permet à une entreprise rencontrant une baisse de son activité de « prêter » un ou plusieurs de ses salariés à une entreprise en manque de main-d'œuvre. Dans sa version allégée, c’est-à-dire sans obligation de refacturation de l’euro à l’euro, seules les entreprises de plus de 5000 salariés et ayant plus de huit ans d’existence pouvaient jusqu’alors mettre à disposition des PME leur personnel. C’est pourquoi, sa durée se limite à deux ans maximum. Dans sa version de droit commun, qui reste applicable pour toute entreprise, l’entreprise prêteuse ne doit pas surfacturer cette main d’œuvre. Le but est de favoriser l’employabilité d’un salarié et de répondre à une problématique rencontrée par deux entreprises. Enfin, sa mise en place est légiférée et repose sur la base du volontariat.
Son recours est donc resté assez limité, jusqu’à présent, car il nécessite une importante organisation et doit répondre à de nombreuses contraintes. Depuis le 10 juin, l’allègement des formalités vise à faciliter sa mise en place dans les secteurs dits « nécessaires à la nation. » Ainsi, les conditions liées aux effectifs, à la taille des entreprises et à la durée du prêt ont été levées. Le dispositif se satisfait d’une convention globale pour un groupe de salariés et d’un avenant au contrat individuel stipulant le nombre d’heures global hebdomadaires de travail à effectuer dans l’entreprise utilisatrice avant le 31 décembre 2020.
Si le prêt de main d’œuvre peut paraître séduisant sur le papier, il reste très complexe au niveau opérationnel. Il présuppose en effet de faire coïncider les besoins de deux entreprises du même secteur d’activité, dont les besoins en compétences sont raisonnablement homogènes, ne souffrant pas de la crise de la même manière et dans lesquelles des collaborateurs se déclarent volontaires.
A cela s’ajoute plusieurs points encore flous qui demanderaient à être résolus dans un temps imparti particulièrement court, comme nous le décrit précisément Gregory Chastagnol :
De plus, si les deux structures montrent les mêmes besoins, cela peut occasionner une fuite des talents ou tout du moins un transfert délicat en cas de concurrence directe. Et comment faire si à la fin de la période, l’entreprise utilisatrice souhaite conserver le collaborateur ou que ce dernier ne souhaite pas réintégrer son entreprise initiale ?
En conclusion, comme le souligne Dominique Brard : « C’est une mesure très intéressante pour gérer les personnes en fin de carrière car c’est un transfert de compétences bien plus intéressant qu’un plan de pré-retraite. Cela peut donc fonctionner dans le cas de figure où il n’est pas nécessaire de sécuriser le parcours du salarié à la fin de la période de prêt. Cependant, cela ne s’adapte pas à un besoin conjoncturel instable et urgent pour lequel nous n’avons pas le recul suffisant à l’heure actuelle pour mesurer les conséquences d’un tel dispositif.
Enfin, posons-nous la question de savoir pourquoi ce dispositif qui existe depuis 2018 a été si peu été utilisé… ».
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